Visite de l'exposition

L’exposition explore les évolutions du style Rococo, du début du XVIIIe siècle jusqu’à ses réapparitions dans le design et la mode actuels, en passant par l’Art Nouveau. Plus de 200 dessins, maquettes, meubles, boiseries, sculptures, luminaires, céramiques sont exposés.

Nicolas Pineau (1684-1754) est considéré comme l’un des inventeurs du style rocaille français. Il s’est illustré dans des domaines aussi divers que l’estampe, la boiserie, la sculpture des façades, le mobilier, l’orfèvrerie, l’architecture…  Appelé en 1716 à Saint-Pétersbourg par le tsar Pierre Ier, il dessine de nombreux projets de décors, jardins, monuments et participe aux chantiers qui transforment Saint‑Pétersbourg. De retour à Paris en 1728, Nicolas Pineau prend conscience qu’il ne pourra pas percer en tant qu’architecte à cause de la rude concurrence. Il travaille pour la noblesse parisienne et pour Louis XV, tout en envoyant des modèles en Allemagne et en Russie.

La multitude de dessins et de maquettes que Nicolas Pineau a réalisés, contribuent à l’intérêt de l’exposition et à la compréhension du style Rococo. Le visiteur peut voir par exemple, les « trumeaux de cheminée pour la maison du prince d’Isenghien à Suresnes », dessinés à la plume en encre bleue sur du papier vergé ; la « vue de la chambre du marquis au château d’Anières avant son démontage » donne un aperçu du style Rococo en matière d’ornement des façades et de leurs issues (portes, fenêtres…) ; la « maquette du grand salon du rez-de-chaussée de l’hôtel d’Orrouer » donne une vision panoramique d’une pièce dont les murs et le plafond sont ornés de dessins et sculptures tout à fait typiques du style Rococo.
De nombreux croquis comme les « Projets de rampe d’escalier pour l’hôtel de Marcilly 1738 », ou « Lambris pour un cabinet au Palais royal en mine de plomb 1735/1740 » montrent les dessins que Pineau esquissait avant la réalisation des sculptures et boiseries.

L’asymétrie est présente dans les formes du Rococo. Cependant certains dessins sont asymétriques dans le but de présenter des propositions alternatives dans une même représentation. Le « dessus-de-porte mi-parti » (deux parties égales en dimension mais dissemblables) ainsi que le « cadre avec quatre propositions » illustrent cette technique de présentation à plusieurs solutions.

Courbes, contre-courbes, sinuosités, motifs étranges caractérisent le style Rococo. On les retrouve dans les décorations intérieures et extérieures des bâtiments et dans différents objets, meubles et bibelots. Les découpes tortueuses d’une commode ornée de statuettes et d’une horloge reflètent cette tendance. Un chandelier par ses lignes très sinueuses et irrégulières met en évidence le refus de géométrie et la forte technicité requise. La prouesse technique du Rococo est aussi illustrée par le « débillardement » visible sur la galerie de fauteuils sur lesquels un pan passe de la face au profil en pivotant sur lui-même.

La fantaisie fait aussi partie du Rococo. Nicolas Pineau a élaboré des représentations hybrides du monde animalier. Des représentations sur papier vergé en témoignent comme le « Coq sur une rocaille, vers 1750 », ou  l’« Angle de cadre sculpté avec hure de sanglier ».

Le Rococo a eu une influence sur l’Art déco. On retrouve le galbe des pieds et leur positionnement à 45° sur une commode en acajou, chêne et ardoise du dessinateur et illustrateur Paul Iribe (1883 – 1935).  Sur cette même commode est exposé un autre détournement du Rococo : une soupière des années 1750, revisitée par Cindy Sherman sur laquelle figure son autoportrait en Madame de Pompadour.

Certains contemporains retrouvent dans la nature les formes du Rococo et s’en inspirent pour concevoir du mobilier, comme cette « Applique Liane, 1953 » de Jean Royère, ou le « Porte-manteau » de Mathieu Lehanneur ou encore la « Dietel Chair »  de Gavin et Alice Munro.

Cette exposition montre bien comment le style Rococo s’est exprimé au fil du temps et l’impact qu’il a eu, tout en ayant été pourtant décrié à certains moments.

Commissaires
Bénédicte Gady, conservatrice en charge des collections de dessins, papiers peints et photographies,
Turner Edwards, doctorant en histoire de l’art,
François Gilles, doctorant en histoire de l’art.

Rédaction : Annick C. , mars 2025

Rococo & Co. De Nicolas Pineau à Cindy Sherman